CELTIC FROST
" Nemesis of Power / Prototype "
Dark metal experimental
Suisse
Compilation non officielle
Cette production de Celtic Frost ne doit pas évoquer grand-chose au lecteur. C'est en effet une sortie non officielle, pourtant digne d'un intérêt particulier pour tout adepte de Celtic Frost, qui se sera penché attentivement sur l'excellente compilation Parched With Thirst Am I And Dying sortie en 1992. Cette compilation se distingue des autres compilations qui ont suivi en ce qu'elle est parfaitement adaptée tant pour les fans que pour ceux qui veulent approfondir le groupe puisqu'elle propose des morceaux rares (versions alternatives issues de sessions de répétions ou inédits) et qu'elle ne regroupe donc pas seulement des morceaux déjà connus, tout en présentant les différents aspects de l'identité de Celtic Frost, au travers de cette courte période mais productive allant de 1984 sur les cendres de Hellhammer à Vanity Nemesis en 1991, qui avait permis à Celtic Frost de redresser la barre après un album surprenant tant musicalement qu'esthetiquement ou conceptuellement avec Cold Lake en 1988 qui cédait alors à la tendance du glam metal… Cette compil annonçait surtout un nouvel album et présentait à ce titre deux inédits qui au final ne finiront sur aucun autre album puisque le groupe ne sortira plus rien avant l'excellent Monotheist 14 ans plus tard. Ce nouvel album annoncé qui n'est jamais sorti n'est pas Monotheist qui témoignait d'un renouveau total après ces 14 années. Entre temps, il y a en effet eu Apollyon Sun, projet metal avec des influences industrielles et electro dans lequel Tom était impliqué de 1995 à 2002.
Pourtant outre ces 2 titres finalisés, il existe bien une trace de la gestation de cet album avorté, que Celtic Frost évoquait dans le livret de "Parched…" en évoquant "the 1991 demonstration materiel", ce que l'on appelle aussi une demo et qui définit bien son rôle initial. Evidemment, ce matériel ne pouvait finir que par fuir à l'ère d'internet, à juste titre car il méritait pleinement une sortie publique. Il est probable que cette petite phrase aient suscité l'envie chez certains de l'obtenir et avec le temps, le progrès technologique et internet, on la retrouve ainsi sur ce CD totalement non officiel, qui aurait pu s'intituler Celtic Frost 1991-2002. Il en existe plusieurs versions car l'une d'elle évoque un hypothétique label intitulé Morbid Tales Records (clin d'oeil à Celtic Frost mais il existe un label brésilien portant ce nom diffisuant des prod officielles sous licence) et pressé en Finlande. Ce flou atteste bien de l'aspect bootelg de l'objet. Seule chose sûr : elle est sortie après 2017 puisque le très soft livret en gris sur fond noir rend hommage à Martin Eric Ain disparu prématurément en 2017. Pour ma part, j'avais déjà eu l'opportunité de trouver cette demo sur internet il y a déjà bien longtemps, elle circulait sur le titre "In session'93" car elle aurait été diffusé en 93 mais enregistré en 92, mais son titre officiel serait "Nemesis of Power", probablement qu'une diffusion bootleg en 93 sème le doute, il apparait qu'un titre à l'état d'ébauche apparait ici "Untitled" alors que c'est en fait, "Under Apollyon's Sun", l'un des deux titres figurant sur la compil 92 ; il est donc probable que ce soit bien là le fameux matériel de 91.
Cette compilation propose également un autre objet tout aussi introuvable, une autre demo datant elle de 2002, qui constitue donc les travaux élaborés par Celtic Frost lors de leur reformation en privé. Ces deux demos n'ont pas grand-chose en commun. Nemesis of Power, comme son nom (inventé?) pourrait le suggérer ,s'inscrit dans la lignée de l'excellent album Vanity Nemesis sorti en 1990. Etrangement cette bonne demo n'a aboutit à rien… elle aurait très bien en l'état pu donner lieu à la sortie d'un mini-cd, même posthume après le split. Celtic Frost nous avait abitué toutefois à se renouveler à chaque album, peut-être ont-ils eu une sensation de vanité justement à sortir un nouvel album qui s'inscrirait dans la continuité plutôt que surprendre et destabiliser, mais après Cold Lake toutefois la destabilisation avait bien failli abattre Celtic Frost qui cherchait peut-etre une stabilité musicale dont il ne voulait pas au fond ? En tous les cas, Cold Lake est d'ailleurs le seul album toujours nno réédité de Celtic Frost, comme si celui-ci reniait cette période, certes pas la plus intéressante, mais l'album est tout à fait écoutable et frostien malgré ces influences glam inattendues. A l'inverse, la demo Protoyype sortie en 2002 propose un Celtic Frost totalement renouvellé et plus destabilisant que jamais. La parenthèse de Tom G. Warrior dans Apollyon Sun semble clairement impacter alors cette nouvelle identité en gestation de Celtic Frost qui semble explorer différentes voies modernes et electroniques à travers ces 10 morceaux qui préfigurent bien peu au demeurant Monotheist qui sortira 4 ans plus tard. Apparemment quelques titres ont servi d'embroyon à la suite : "November" (piste 5) donnera "Obscured", morceau un peu à part sur Monotheist mais dans une version effectivement obscurcie, dépouillé de l'aspect electronique qui semble très présent sur cette demo, héritage probablement de Apollyon Sun qui disparaitra sur Monotheist ; "Relinquished Body" (titre 7) servira de base pour le morceau "Myopic Empire" de Triptykon, le projet post-Celtic Frost, sur leur premier album en 2010. Le reste n'a visiblement pas été exploité ; il y a beaucoup d'idées, du bon, du moins bon. La demo commence bizarrement par avec une reprise très étrange du "Helter Skleter" des Beatles, un morceau electronique un peu trip hop avec des voix plutôt bizarres tantôt chuchotées ou criées. Ces percus deviennent plus break beat sur le morceau suivant plus rythmé ; concrètement le Celtic Frost debut des années 2000 semble pousser encore plus loin les expérimentations de Apollyon Sun. Les éléments metal n'apparaissent que sur le 3eme titre, dont seuls les lyrics ont fini sur un autre morceau de Monotheist. Effectivement, on decouvre un son plus massif, toutefois plus groovy que ce que fera Celtic Frost par la suite, plus Apollyon Sun là encore. Il y a cependant un coté torturé qui transparait déjà. Certains morceaux sont vraiment destabiliant scomme "Get wiked", un affreux morceau de 1:30 qui est carrément du hip hop avec des voix adaptées méconnaissables. Une expérmentation hasardeuse suivie par "Hip Hop Jungen", morceau de 5mn, qui n'est pas du hip hop cette fois-ci, mais une sorte de morceau qui a des accents très Laibach de l'époque Wat (pourtant sorti après la demo), avec une musique electronique martial, et à nouveau assez bizarre, un chant qui rappelle Rammstein, chanté en allemand avec un chant féminin narratif, des chœurs martiaux et qui se termine par un "Revolucion!" scandé. Force est de reconnaitre est cee morceau se révèle vraiment excellent mais il aurait été vraiment étrange que Celtic Frost évolue dans cette voie prometteuse… Cela aurait plus sa place dans un nouveau side projet mais visiblement beaucoup des explorations faites sur cette demo n'ont abouti à rien. On sent toutefois que Celtic Frost était plein d'idée novatrices mais la demo manque vraiment d'unité et de cohérence. Il est probable qu'elle soit un avant-gout de différentes voies possibles qu'aurait pu prendre Celtic Frost qui était déterminé à ne pas se répéter et à développer une nouvelle identité et qui a dû sonder les réactions des rares auditeurs à qui elle a été diffusé à l'époque. A noter que Nemesis of Power propose un moirceau un peu expérimental de 2mn basé sur un sample du célèbre du célèbre Carmina Burana avec un boite à rythme un peu froide.
Cette compilation non officielle de 17 titres inédits (dont un morceau demo présent sur Parched) se révèle être un objet clairement intéressant à titre historique et à titre musical sur la parenthèse séparant Vanity Nemesis, dernier album sorti sorti en 1990 avant le split, et l'excellent Monotheist sorti en 2006 qui engendrera le projet Tryptikon dans la foulée, avec deux demos jamais rendues publiques qui n'ont pas grand chose en commun. Cette compilation mériterait clairement une sortie officielle avec des infos fiables (date, artwork, contextualisation) ; Nemesis of Power trouverait inévitablement ses fans, et mériterait à elle seule une diffusion officielle soit sous forme d'un mini-cd ou de bonus à Vanity Nemesis, et Prototype restera un objet musical non identifiable dont la diffusion publique pourrait destabiliser l'adepte de Celtic Frost.
Adnauseam