"Imago"
Dark metal original
France
Holy records, 2005
L'histoire de SUP est plutôt particulière; initialement crée en 1990 sous le patronyme de SUPURATION en tant groupe de death metal avant-gardiste, il décide dès 1995 de se nommer sobrement SUP afin de se débarrasser des connotations death metal attachées à son nom. Puis SUP finit par trouver un sens à son nouveau patronyme, autre que celui d'un simple diminutif non connoté death metal, en fixant SUP comme étant désormais les initiales de Spherical Unit Provided, ce qui colle bien à l'univers de SUP. Mais plus tard en 2003, SUPURATION et SUP deviennent deux entités distinctes sommeillant en une, puisque SUPURATION revient à l'existence le temps d'une parenthèse avec Incubation, un très bon album dont les textes relatent l'histoire antérieure à celle développée dans The Cube (1993). Cette parenthèse fermée, c'est SUP qui revient à l'avant avec une fois encore un concept fictif, basé sur une drogue fictive, la chrysalide, qui a la capacité de régénérer les personnes dépressives ou dégénérescentes, nombreuses parmi les futures générations, mais qui ne peut être prise qu'une fois en une vie. C'est là que commence l'histoire puisque le personnage en est à sa deuxième prise ce qui altère sa vie.
Je n'ai jamais été friand de ces concepts futuristes, bien qu'élborés, mais cela sert de support pendant 56mn à un style de metal particulier, assez difficile à définir, que SUP a élaboré dès Anomaly, qu'il a peaufiné, décliné et approfondi, et qui constitue le style personnel de SUP. Imago, la septième création de la formation, la cinquième pour SUP, après Anomaly (1995), Room seven (1997), Chronophobia (1999), Angelus (2002), en est l'une des meilleurs expressions. Du death metal avant-gardiste initial, il ne reste qu'un chant un peu death devenu minoritaire couplé avec des voix claires particulières, très efficaces à la fois plaintives et hypnotiques, sur des mélodies étrangement construites comme des mélodies gothiques même s'il ne s'agit pas du tout de ça, hypnotiques, accompagnées par quelques nappes de synthé, le tout dans une atmosphère froide.
Pour ma part, cet album est l'un des meilleurs enregistrements de SUP avec Anomaly, avec "Nothing I control" qui s'inscrit parmi leurs meilleurs morceaux. Imago ne propose au demeurant que du pur SUP, certes sans surprise, mais à son meilleur, sans passage inutile ou difficile à cerner comme on en trouvait sur le précédent album, mélodique comme toujours, entrainant, plus froid que d'habitude, émotionnel et bien construit; et c'est bien l'impression que nous laisse le morceau éponyme "Imago" qui clôture l'album.
Adnauseam (2005)
"Traces (Part one)"
Dark metal
France
Metaluna, DVD 2007
Etrange objet que voilà ni vraiment officiel (dans le sens où il n'y a pas eu vraiment de promotion et que ça ne sort pas vraiment sur Holy records) ni bootleg ni autoproduction mais une collaboration entre Metaluna productions, Holy records (label officiel de Sup) et Sup, objet qui s'annonce comme le premier d'une série. Niveau bootleg, SUP n'est pas étranger à la chose puisqu'il diffuse parfois officiellement des bootlegs de vieilles performances, 2 sont déjà sortis sous forme de cd et 4 au format vidéo VHS. Par ailleurs, un dvd officiel du groupe est sorti en 2001 chez Holy Records mais comme son nom l'indique (To Live Alone), il ne s'agit pas d'un live comme les autres puisqu'il s'agit d'un enregistrement sans public. Alors l'idée était très bonne, d'autant que le public metal basique en live se révèle souvent lourd et limité à une compréhension bien superficielle d'une musique subtile comme celle de SUP. "Traces" représentent donc les premières traces professionnelles d'une vraie prestation de SUP (si l'on ne tient pas compte du dvd collectif du festival de la Holy Party axé sur Supuration toutefois) car les conditions sont différentes lors d' un face à face avec le public.
Toutefois, dans ce face-à-face c'est clairement SUP qui est filmé, il n'y a pas d'égarement à filmer démagogiquement le public et la "bonne ambiance" car le spectacle n'est pas dans la fosse. Metaluna a filmé ça de façon très professionnelle, pas au sens aseptisé des dvd de gros groupes, mais au sens où le concert devient presque un film, avec pas mal de gros plans sur les vidéos projetées pendant la prestation, et avec le souci qu'elles soient visibles sur la plupart des plans. Ayant assisté à deux concerts de SUP, c'est agréable d'en retrouver l'atmosphère exacte. La qualité du travail de Metaluna s'explique par le fait qu'il s'agit à la base d'une maison de production de films d'horreur underground (souvent franco-argentins?!?) pour lesquels SUP a réalisé certaines BO (le groupe s'était déjà lancé dans ce genre d'expérience au début de Supuration avec une BO pour une adaptation de "Jacques le fataliste").
Au niveau du contenu, il s'agit d'une prestation de la tournée du très bon Imago, on retrouve donc sans surprise les morceaux "From blood of chrysalis", "Insect drug", "Hybrid state", "The deformed army" et "Apprehension", même si c'est l'album Anomaly qui marque, comme depuis longtemps, le début de la prestation avec l'intro "Anomaly" suivi de "Pain injection" qui est selon moi l'un des meilleurs morceaux de SUP. On retrouve également "The Uly-töhas" qu'on trouve sur la réédition augmentée de Anomaly. Autant dire que le contenu m'a bien ravi puisque majoritairement composé de Anomaly et Imago qui sont pour moi les deux meilleurs albums de SUP. Un seul titre de Chronophobia avec le morceau éponyme et c'est l'album Angelus qui clôt la prestation avec "Ex-animo", le premier morceau de l'album, suivi de "Labimente". Il y a toutefois un grand absent dans cette prestation représentative de la tournée Imago: le morceau "The cube" du premier Supuration, matrice des meilleurs morceaux de Sup, pourtant joué lors de leur prestation grenobloise.
Le dvd est complété par une partie non négligeable de clips qui sont loin des clichés et qui n'ont donc rien d'insipides (ce ne sont pas du clip pour faire du clip). Au contraire, ils ont le rôle d'un prolongement esthétique et se dispensent de la simple mise en scène habituelle des membres du groupe, pour un résultat assez torturé: "Twins" de Chronophobia est réalisé à base de dessins, "Hybrid state" de Imago évoque l'esthétisme de l'album, "Labimente" de Angelus, avec son coté electro, est en noir et blanc avec la camera fixée sur le visage d'une personne perturbée avec le sous-titrage des paroles parfois en français parfois en anglais qui reflètent ses tourments existentiels. "Ex-animo" se trouve initialement également sur Angelus mais il s'agit ici d'une version remixée par DIVISION ALPHA qui sont un peu les SUP version electro avec, faut-il le rappeler, en leur rang Frederic Fievez, bassiste de SUP. Le clip réalisé par Division Alpha brasse des images religieuses de toute époque, évoquant probablement le besoin métaphysique de l'homme. A cela s'ajoute un deuxième inédit de plus de 6mn en guise de clip avec "Les larmes dans l'oubli", dans un registre plutôt ambient oppressant, illustré par un homme errant dans les bois et la neige que l'on sent en proie à des pensées douloureuses. La démarche de ces clips, toujours dans le flou, aux couleurs sombres, avec des montages d'images, m'a rappelé, certes dans un autre genre, l'excellent travail esthétique et conceptuel des premiers clips de My Dying Bride.
Traces se révèle être un très bon dvd, très professionnel au bon sens du terme, bien loin d'une démarche commerciale, qui restitue très bien l'état d'esprit de cette unité sphérique fournie.
Adnauseam (2009)