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LAIBACH (14/05/2005 - Neuchatel /Suisse)

LAIBACH

14/05/2005 Case à Chocs - Neuchâtel (Suisse romande)

 Par Adnauseam

Photos par Cyril D.

Laibach - live 2005

Cela faisait longtemps que je n'étais pas retourné à la Case à Chocs. Mon précédent concert dans cette salle avait été les gothiques belges de Swan Death aux côtés de  Noctule Sorix, Violet Stigmata et S-Tantale. J’avais également pu y voir Kirlian Camera, accompagné de Criminal Asylum et Leutha, le 24 février 2001 pour être précis. Ce fût encore une fois un plaisir d'y retourner, surtout dans ces circonstances car quel plaisir de pouvoir revoir Laibach, un peu plus d'une année seulement après leur excellente prestation en octobre 2003 à l'Usine à Genève. Cette fois la salle n'était que moyennement remplie et non comblée comme à Genève, peut-être que Neuchâtel paraît pour certains le fin fond du monde, tant pis pour les absents!

Après une introduction, Laibach se présente sur scène comme à l'accoutumée en tenue martiale: le chanteur avec son traditionnel "look" de prophète, des guitaristes en chemises brunes et bottes paramilitaires; quoique le groupe paraît moins martial et "fasciste" (pour reprendre les expressions des gens qui ne comprennent jamais rien à rien…) qu'à ses débuts avec pour certains des coupes de cheveux un peu pop rock anglaise. N'oublions pas en effet que Laibach est un vieux groupe du début des années 80, qui depuis sa création, distille une musique assez avant-gardiste avec des concepts totalitaires.  Pour preuve le groupe est passé d'un industriel expérimental, répétitif et bruitiste les premières années, à un industriel symphonique qui a influencé toute la vague actuelle, puis s'est engagé dans une étrange période faite de reprises de hits tout cela en version militariste, où les paroles originelles prennent alors une autre signification avant de revenir avec ce Wat à une musique très électronique et dansante tout en étant  incroyablement martiale.

Au bout de quatre titres, la prestation prend, comme sur l'ensemble de la tournée, un autre tournant avec l'entrée en scène de deux jeunes femmes qui exécutent une prestation militariste incroyable. Ces deux femmes originaires également de Lubjana en Slovénie font en fait partie d'un groupe de trois filles assez étonnantes qui s'appelle Make Up 2. Je vous invite à visiter leur étonnant site, car c'est à se demander si leur groupe de pop slovène n'est pas aussi lourd de significations que Laibach… Malgré l'incroyable différence entre les deux formations, leur recrutement n'est peut-être pas un hasard. Laibach précise même que ces jeunes femmes, présentes depuis le début de la tournée de l'album Wat, sont plus "laibachiennes" que Laibach ne l'a jamais été. Il ne s'agit pas du tout de pom-pom girls, ni de majorettes, ni de simples figurantes ou encorede poseuses mais d'une prestation hautement totalitaire: deux très belles femmes, en grande forme physique, nous présentent là des exercices militaires avec classe et précision, telles des automates avec une froideur imperturbable. Ne cherchez pas ici de pseudo-militarisme sado-maso, bon pour les gogoths; non, ici il s'agit d'une prestation réellement totalitaire, avec un clin d'œil évident aux exercices physiques des femmes dans les années 40.

Laibach - live 2005 Laibach - live 2005

Laibach - live 2005

 

 

Concernant le contenu musical, Laibach a évidemment orienté le contenu sur l'excellent Wat, dont la tournée mondiale semble d'ailleurs ne jamais finir pour notre plus grand plaisir. Entre autres titres de Wat quasiment en intégralité, on notera l'excellent "Now you will pay", le hit "Tanz mit Laibach", ainsi que "Achtung!", "Ende","Hell: Symmetry", "Das spiel isdt aus", "Wat", dans des versions un peu différentes de l'album avec des effets en plus par des guitares électriques. On notera également la présence de "God is god", extrait de leur album plutôt metal, Jesus christ superstar, et évidemment  des fameuses reprises dont seul Laibach a le secret. L'incroyable reprise laibachienne de "Life is life" (oui tout comme "God is god" encore un titre tautologique...pas un hasard !) ne pouvait être oubliée, l'occasion d'exécuter également la reprise de Queen "Geburt einer nation" où nos deux demoiselles disciplinées se permettent de se détacher les cheveux et de les balancer d'une manière incroyablement figée telles des poupées sur ce "hit rock". Progressivement au cours de la prestation, le petit chapeau traditionnel slovène a été enlevé puis les cheveux à ce moment-là détachés! L'improbable reprise de Europe "The final countdown" ne pouvait manquer à l'appel, avec là encore une forte différence entre les deux versions. Les reprises sont ainsi enchainées en fin de concert et pour le rappel. En rappel, on aura d'ailleurs droit à "Mama Leoni" qui est un hymne européen à la base, avec nos deux demoiselles cette fois-ci armées de cymbales. Tout comme à Genève une année avant, la prestation se termine d’abord par le remix dansant de "Tanz mit Laibach" au cours duquel le groupe nous salue et nous applaudit, puis une vieille chanson allemande sert de clôture alors que le groupe s’est retiré.

Laibach - live 2005

Tout cela, le visuel, le concept totalitaire développé au fil des années, rappelle évidemment toute la vague industriel martial actuelle dont Laibach et Death in June sont les principales références. Evidemment, cette imagerie totalitaire que Laibach développe depuis ses débuts et dont il ne s'est jamais séparé, quelque soit son évolution musicale d'ailleurs, a toujours fait couler beaucoup d'encre. Le lien entre la politique et la musique de Laibach pourrait se résumer par cette phrase qui figure dans le livret de leur premier album éponyme: "Politics is the hightest all embracing art and we who create Slovenian art, we consider ourselves to be politicians". A cela s'ajoute l'appartenance au mouvement du nouvel art slovène, dont Laibach n'est que le pendant musical et bien-sûr à cet Etat crée par Laibach: le NSK; ou encore les samples de Tito au début des années 80, et également le  patronyme même du groupe qui est le nom allemand de Lubjdana, la capitale de la Slovénie. Laibach se révèle donc être un groupe très intéressant qui a su très bien se renouveler avec son nouvel album Wat et qui donne à réfléchir !

Laibach - live 2005

Un after décalé

La fin de la prestation de Laibach ne marque pas cependant la fin de la soirée puisque comme indiqué sur les flyers devait venir Tidal Wave que l'on supposait être une première partie à l'origine, mais annoncé juste après le concert de Laibach. Je pensais qu'il s'agissait d'une formation liée à l'industriel puisque Laibach refuse les premières parties qui ne sont pas de son cru, mais là un compromis a dû être fait puisque cette prestation énigmatique n'aurait lieu qu'une fois le spectacle de Laibach fini comme si deux soirées indépendantes s'enchainaient. Ici il n'est pas question d'industriel de près ou de loin mais d'un groupe de metal des plus basiques, pas sensationnel mais surtout qui ne cadrait pas du tout avec cette soirée. Reconnaissons que succéder à un tel spectacle rendait la tâche d'être à la hauteur difficile voire impossible. Cette seconde partie de soirée d'abord inattendue se révèla plutôt déconcertante et pas du tout appropriée à l'industriel martial. Tidal Wave est en fait un groupe de la région parisienne qui ne fera à l’évidence pas apprécier le metal aux amateurs de musique industrielle qui n'accrochaient déjà pas pour certains le dark metal; alors imaginez du metal aucunement lié aux scènes indus, folk ou goth… surtout qu'il s'agit ici d'un groupe plutôt heavy/thrash, sans grande personnalité ni maîtrise. Le concept est plutôt orienté bd/heroic fantasy, avec un début de prestation franchement déconcertant voir ridicule, avec cette impression inefficace de vouloir faire peur tout en s'y ratant, le chanteur avec son  "aube noire" rappellait un peu Gloomy Grim lors de leur passage à Grenoble en 1998 avec baskets blanches non assorties, mais ici en pire… avec un jogging dessous??? Il s'agit donc d'une prestation très cool, plutôt faux méchant. Et puis tout n'est pas maîtrisé par ce groupe malgré ses dix ans d'existence. On appréciera la présence successive de deux chanteuses, qui peut-être voulaient faire goth (?), mais quelque chose ne collait pas dans l'ensemble. Ces voix féminines non lyriques ne s'imposaient pas à leur musique. On aurait dit que les musiciens voulaient surtout faire chanter leurs copines; certes c'est sympa mais ça n'apportait rien du point de vue musical. Au final, Tidal Wave m'a plutôt évoqué les groupe metal qu'on trouve à la fête de la musique. Passons cependant aux point s positifs: des musiciens au final sympathiques qui puisaient en fait leur source dans Iron Maiden. C'est probablement en envisageant que le groupe puisse être dans une optique "dark metal" (il faut bien chercher des liens plus ou moins éloignés avec Laibach...) que j'ai été dur, et puis vu l'heure tardive, ça n'a pas non plus aidé à être tolérant. Le public venu pour eux était de toute manière très minoritaire… mais satisfait! Le groupe proposait cependant quelques mélodies sympathiques à la Iron Maiden, en plus thrash peut-être… On notera la reprise justement de "Hallowed be thy name" qui semble avoir ravi le public restant (peu nombreux) et qui clôtura cette soirée.

 

Pour conclure, cette soirée était  peut-être à concevoir comme divisée en deux. Mais ces deux parties n'allaient assurément pas ensemble, ce qui provoquait un déséquilibre qui n'a pas joué en faveur de Tidal Wave qui aurait mieux eu leur place dans un cadre rock ou metal. Et après la prestation charismatique et totalitaire de Laibach, il était bien difficile de trouver sa place. Mais peu importe, la prestation de Laibach était définitivement excellente et l'on peut remercier l'initiative de la Case à Chocs de les avoir fait passer!

Adnauseam

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