29/06/2007
L'Usine, Genève
Norma Loy fait désormais partie des groupes cultes des années 80's qui seront passés dans ce temple de l'underground qu'est l'Usine. A l'instar de Clair Obscur passé en ce même lieu fin 2004, Norma Loy s'est récemment reformé mi-2006 après avoir été une formation culte dans l'underground pendant les années 80 puis splitté en 1993. Il est probable qu'après toutes ces années de silence, Norma Loy, dont le patronyme est l'anagramme de "Nom royal" n'est pas connu des plus jeunes bien que ce groupe à forte identité ait été précurseur à plusieurs niveaux. On pourrait définir leur style entre cold wave, rock indus et new wave. Normaloy se définit pour sa part comme du rock psychanalytique.
Pas de première partie ce soir ; c'est après une purification de la salle avec de gros encens que le groupe arrive sur scène. Le duo initial, composé de Chelsea (chant + textes) et Usher (synthés + composition de la musique) revient ici accompagné de 3 nouveaux autres musiciens. L'univers de Norma Loy est assez particulier tout en étant encré dans l'esprit des années 80 mélangeant folklore SM, psychanalyse (notamment la sexualité refoulée) et spiritualité orientale comme le bouddhisme, voire également imagerie diabolique (pensons à un titre comme "666 We Shall Win" sur Sacrifice). Cet univers est très bien retranscrit visuellement avec Chelsea chantant et dansant dans une panoplie très bouddhiste, crâne rasé et tenue vestimentaire de méditation avec au dos un énorme oeil, celui qu'on retrouve partout chez Norma Loy.
Tout au long de la prestation, auront lieu sur certains titres des mini-performances par une femme à chaque fois au visage caché : tout d'abord vêtue de blanc et tenant de gros bâtons d'encens, puis en dominatrice avec fouet, ou portant un masque de tête de diable, ou encore et jouant le rôle d'une femme fatale bourgeoise fumant une cigarette, et pour finir lors du rappel dans un personnage rappelant celui du Cercle (probablement d'ailleurs une femme asiatique comme celle qui peuple aussi l'univers visuel de Norma Loy). En arrière fond, toutes les pochettes du groupe défilent parmi d'autres images mêlant raffinement et décadence où l'on peut voir par exemple femme blessée ou bien pénétrée.
En ce qui concerne l’aspect musical, on notera parmi les titres joués un très vieux titre pour commencer puis 1964 shadows (le genre de morceau qui a dû influencé Jacquy Bitch), mais aussi l'excellent et incontournable "Power of spirit" de Sacrifice, véritable hymne du groupe avec ses synthés new wave (sans les saxo d'origine) ou même Nagashima avec son style tribal indus, et Rebirth au cours duquel Chelsea descendra dans le public, ce qui donnera lieu à un jeu avec un espèce de drogué qui se prenait pour un marabout. Avant le concert, celui-ci avait d’ailleurs fait une grande entrée d'illuminé avec son look de marabout avant de s'écrouler au milieu de la salle. Qui sait peut-être un improbable adepte de NORMA LOY à qui le message spirituel aurait fait péter les plombs ?!? Puis, en guise de rappel, Norma Loy exécutera "Black Jesus" et "We want (Eden 2)" de Sacrifice, enchaînés comme sur l'album et agrémentés d’une performance rappelant le film Le Cercle. Parmi les bons titres non joués (et que je vous recommande si vous ne les connaissez pas)qu' il aurait été judicieux d'honorer, on peut penser à "Frustration" sur Rebirth (proche de "Power of spirit"), "Fun house" de Rewind ou le rituel "Eden is rising" dans Tvision ou encore la surprenante reprise d'Edith Piaf, "L'homme à la moto" sur Sacrifice (à mon avis le meilleur album). La playlist a quand même été bien élaborée, des débuts aux derniers albums peut-être plus pop, présentant bien le groupe dans sa diversité mais avant tout sa forte identité.
Je conclurais cet article en évoquant les débuts de Norma Loy qui s’entourait d’un voile de mystère, se présentant initialement comme membre d'un mouvement qu'il nommait le CPM. D'ailleurs le logo est toujours abordé par le groupe (car indissociable). On pouvait trouver cet intéressant message glissé dans le premier vinyl du groupe Rewind / TV eye (aujourd'hui non regroupés sur un même CD) : "Au début était la conscience. Une conscience qui est une connaissance totale, immédiate, absolue qui embrasse l'Homme, le Cosmos, la Divinité. Mais cette conscience fut perdue, dispersée, rejetée par les perversions continuelles d'un monde excluant les réalités mystiques[...]. Il est possible de retrouver notre conscience". On précise même comment devenir membre du CPM : il faut envoyer une photo d'identité, un texte ou tout autre forme de travail mettant en oeuvre une perversion de soi ou la notion de réalité ambiante et 10 timbres... En outre il est précisé qu'on peut se procurer les productions du CPM à savoir des K7 de NORMA LOY et également d'un certain Anthon Shield (en fait Usher) sans avoir à adhérer au CPM. Une adresse est indiquée sur Dijon d’où est originaire le groupe...
Normaloy est incontestablement un groupe à découvrir ou redécouvrir ; encore un des incontournables qui aura figuré au programme des fameuses soirées electro dark organisées par le Baron Von Smock du Kab.
Adnauseam